Ecole Doctorale

ESPACES, CULTURES, SOCIETES - Aix Marseille

Spécialité

Sociologie

Etablissement

Aix-Marseille Université

Mots Clés

Maroc,Enseignement des langues,Système éducatif national,Identités,Construction des savoirs,Citoyenneté

Keywords

Morocco,Language teaching,State education system,Identities,Knowledge construction,Citizenship

Titre de thèse

L'enseignement des langues à l'école publique au Maroc : construction des savoirs, identités et citoyenneté
Language education in state schools in Morocco: knowledge construction, identities and citizenship

Date

Jeudi 7 Novembre 2019 à 14:00

Adresse

MMSH, 5 rue Chateau de l'horloge 13090 Aix-en-Provence PAF

Jury

Directeur de these Mme Yolande BENARROSH Aix-Marseille Université
Rapporteur Mme Rahma BOURQIA Université Mohammed V
Rapporteur M. Philippe BLANCHET Université Rennes 2
Examinateur Mme Catherine MILLER Aix-Marseille Université
Examinateur Mme Françoise LORCERIE Aix-Marseille Université
Examinateur M. Jean-Paul PAYET Université de Genève
Examinateur M. Frédéric ABECASSIS Institut Français d'Archéologie Orientale (IFAO)

Résumé de la thèse

Au Maroc, l’aménagement linguistique dans le système éducatif national, et plus largement les différentes langues en présence dans la société marocaine – arabe, amazigh, français, anglais et espagnol particulièrement – font l’objet de débats politiques, idéologiques et sociaux depuis la fin du protectorat français (1956). Ces débats mobilisent le plus souvent des argumentaires identitaires passionnés au nom de valeurs sociétales et civilisationnelles antagonistes dans un contexte de tensions entre savoirs locaux et savoirs mondialisés. Ils s’appuient sur et contribuent à développer des idéologies linguistiques qui enferment ces langues dans des mondes de références qui semblent clos sur eux-mêmes et en opposition les uns face aux autres. Si ces débats et ces idéologies, ainsi que leurs enjeux et leurs conséquences, ont été analysés de manière approfondie à travers diverses approches disciplinaires, il existe fort peu d’études portant sur la question des langues à l’intérieur de l’école publique marocaine. Or, au-delà de ces débats sur-politisés et sur-idéologisés qui font rage en dehors de l’école, que se passe-t-il à l’intérieur de l’enceinte de l’école concernant les langues ? Une langue n’est pas le medium ou le véhicule neutre d’un savoir atemporel ou a-culturel, elle est un medium pour comprendre, penser et dire le monde ainsi que pour comprendre, penser et dire soi et l’autre. Elle est ainsi une forme essentielle d’appréhension, d’énonciation et d’appropriation du monde, de l’appartenance, de l’identité individuelle et collective, d’autrui, ainsi qu’une forme essentielle de socialisation. Aussi, comment chacune de ces langues en présence est-elle construite par l’école publique marocaine depuis les curricula jusque dans les modalités d’enseignement dans les salles de classe ? Comment est-elle enseignée et quelles performances sont valorisées dans chacune ? Quelles conceptions du savoir et quels types de savoir y sont construits, valorisés et légitimés ? Quel rapport au monde, quels mondes de références et quelle vision de soi et de l’autre sont développés dans chacune ? Quels porteurs de savoirs et quels acteurs-locuteurs-auteurs y sont valorisés et légitimés ? Quelle(s) forme(s) de citoyenneté et d’identité citoyenne y sont promues ? D’autre part, comment les acteurs du terrain éducatif eux-mêmes (enseignants et élèves notamment) interprètent, s’approprient, investissent et transforment-ils ces constructions des différentes langues, ces mondes de références et ces conceptions du savoir, de l’identité et de la citoyenneté véhiculés par l’école publique ? Pour répondre à ces questions, cette thèse présente et analyse tout d’abord les enjeux politiques, sociaux et identitaires qui sont à l’œuvre dans les politiques linguistiques éducatives au Maroc, ainsi que les débats et les positionnements tant au niveau des décideurs et personnalités politiques qu’au sein de la société civile depuis l’indépendance. Les questions ci-dessus sont ensuite traitées à partir du travail ethnographique réalisé en l’espace de deux années scolaires à l’intérieur de neuf établissements publics – trois écoles primaires, trois collèges et trois lycées – en milieux urbain et périurbain dans trois localités différentes de deux régions du royaume. Les analyses s’appuient sur des observations de cours des cinq langues avec différentes classes de tous niveaux et des interactions à l’intérieur des différents espaces scolaires, sur l’étude de documents (curricula, manuels, productions d’élèves, etc.) et sur des entretiens avec divers acteurs de l’école : responsables administratifs, inspecteurs, directeurs d’établissements, enseignants, élèves, anciens élèves et parents.

Thesis resume

In Morocco, language policies in the state educational system and, more widely, coexisting languages in Moroccan society – Arabic, Amazigh, French, English and Spanish – are the focus of heated political, ideological and social debates since the end of the French protectorate (1956). These debates oppose antagonist arguments based on issues and values of identity, society and civilisation in a global context of tensions between local and globalised knowledge. They rely on and participate in developing language ideologies that lock languages in sealed and opposed worlds of meanings and references. Although these debates and ideologies, as well as their consequences, have been analysed thoroughly through different disciplinary approaches, few studies exist on languages from within Moroccan state schools. Beyond the roaring of these highly political and ideological debates outside school, what is happening with languages inside the school walls? A language is not a neutral medium or vehicle for forms of knowledge outside time and culture, it is a medium for understanding, thinking and speaking the world as well as for understanding, thinking and speaking the self and the other. It is a key way of grasping, articulating and appropriating the world, belonging, individual and collective identity and a key way in the socialisation process. Hence, how is each of these languages constructed in Moroccan state schools in official curricula as well as in teaching practices in classrooms? How is it taught and which skills are valued? How and what knowledge is constructed and valued? Which relationships to the world, to the self and the other and which worlds of meanings and references are developed in the teaching of each language? Which knowledge-bearers and actors-speakers-authors are valued? Which forms of citizenship and social identity are promoted? Moreover, how do school actors themselves (especially teachers and pupils) interpret, appropriate and transform these language constructions, these worlds of meanings and these conceptions of knowledge, identity and citizenship? To answer these questions, this work first presents and analyses the political, social and identity issues at stake in Moroccan language education policies as well as debates and arguments among political leaders and within civil society since independence. It then analyses the ethnographic material collected through fieldwork over a period of two school years in nine different schools – three primary schools, three middle-schools and three high schools – in urban and suburban places in three different towns. Analyses are drawn from participant observations in language classes and in the different school spaces, from written documents like curricula, textbooks and pupils’ notebooks and from interviews conducted with actors such as school administration officials, inspectors, headmasters, teachers, pupils, alumni and parents.