Ecole Doctorale

ESPACES, CULTURES, SOCIETES - Aix Marseille

Spécialité

Anthropologie

Etablissement

Aix-Marseille Université

Mots Clés

Jeunesse,anthropologie,frontière,Mayotte,école,exclusion

Keywords

Youth,anthropology,border,Mayotte,school,exclusions

Titre de thèse

Pour une anthropologie des jeunesses précaires à Mayotte. Exclusions et relations d'altérité post-frontière
For an Anthropology of Precarious Youth in Mayotte. Exclusions and relations of post-border otherness.

Date

Mercredi 12 Juillet 2023 à 14:30

Adresse

Maison Méditerranéenne des Sciences de l'Homme 5 Rue du Château de l'Horloge - CS 90412 13097 Aix en Provence Cedex 2 salle Duby

Jury

Directeur de these Mme Sandra FANCELLO Aix Marseille Université
Rapporteur M. Gilles SéRAPHIN Université de Paris Nanterre
Rapporteur M. Nicolas ROISARD Université Clermont Auvergne
Examinateur Mme Myriam HACHIMI ALAOUI Université Le Havre Normandie
Examinateur Mme Elise LEMERCIER Université de Rouen
Examinateur Mme Florence RENUCCI Aix Marseille Université

Résumé de la thèse

Cette thèse vise à explorer les différentes figures des jeunesses précaires de Mayotte, prises dans des logiques d’exclusion et des rapports d’altérité complexes en lien avec la frontière politique puis administrative établie dans l’archipel depuis 1975. La politique française de lutte contre l’immigration clandestine, qui va de pair avec une altérisation historique conflictuelle avec les Comores, ouvre sur une série de dénis de droits, de (risques de) dangers et de discriminations à l’égard de la communauté comorienne installée à Mayotte, et, plus précisément, des jeunes générations. Les conséquences du décentrement d’une frontière européenne au cœur de l’archipel comorien depuis que Mayotte est devenue une région ultrapériphérique de l’Europe (RUP) en 2014, alimentent une réflexion qui transcende l’ensemble de mon étude. Les processus d’exclusion sont présentés comme une sorte de fil rouge de l’expérience des étrangers à Mayotte, et plus particulièrement des mineurs : la notion d’exclusion est alors pensée comme une réflexion transversale au regard des multiples formes de relégations (sociale, scolaire, familiale, administrative) subies par les jeunes issus des mobilités insulaires et, plus largement, par la communauté comorienne. Cette recherche contribue à l’examen anthropologique d’une société qui, en quelques décennies, a connu d’importants et rapides bouleversements normatifs, marqués par une croissance démographique et des flux migratoires dynamiques ayant produit une série de ruptures générationnelles, socioéducatives, culturelles et sociales. Nous proposons d’examiner la nature de ces changements et de questionner la manière dont les générations « post frontières » et leurs familles s’approprient ou non le cadre normatif européen. Afin de mieux comprendre la genèse d’une éducation aux racines africaines sur un territoire français où se pose la question de la transmission et de ses limites en contexte migratoire, cette thèse s’intéresse aux familles comoriennes installées à Mayotte et confrontées à un environnement socioéducatif perturbé, l’objectif étant de révéler leurs stratégies d’adaptation, la (nouvelle) place accordée aux jeunes, ainsi que les représentations qui entourent leur éducation en contexte « migratoire ». Or, dans un contexte où la racialisation conflictuelle des rapports sociaux conduit à une politisation et une polarisation des débats autour de l’altérité comorienne et africaine, l’enfance, sa protection et son insertion, apparaissent d’abord au regard de la politique de lutte contre l’immigration clandestine et son corollaire, le combat multiforme contre de possibles « appels d’air » qui pourraient permettre à un plus grand nombre « d’étrangers » de se maintenir sur le territoire et ainsi augmenter l’attractivité de Mayotte. Cette thèse se propose alors d’investir un champ d’étude encore vierge, à savoir celui des migrations juvéniles transfrontalières dans l’archipel, et vise à mettre au jour les mécanismes à l’origine des migrations de mineurs et les dimensions familiales, culturelles, juridiques, politiques, morales et sociales qu’elles revêtent. À Mayotte, la complexité du rapport à l’étranger migrant s’enracine dans une conflictualité historique : le combat de Mayotte française, en parallèle de l’accès à l’indépendance des Comores, est devenu le support d’une revendication identitaire singulière. En définissant le contour des figures de l’altérité et ce qu’elles nous apprennent sur l’imaginaire collectif mahorais, nous verrons comment l’identité mahoraise et la sauvegarde d’un patrimoine culturel mahorais, qui tentent de s’affranchir de leur héritage comorien repoussé aux marges de l’histoire, cristallisent des enjeux heuristiques majeurs. Dans cette dynamique, ma thèse vise à interroger les processus de catégorisation et la spécificité de la place accordée à « l’étranger comorien » ainsi qu’à sa nouvelle figure contemporaine : le mineur comorien.

Thesis resume

This thesis aims to explore the different figures of the precarious youth of Mayotte, caught in logics of exclusion and complex relationships of otherness in connection with the political then administrative border established in the archipelago since 1975. The french policy against illegal immigration, which goes hand in hand with a conflicting historical othering with the Comoros, opens on a series of denials of rights, (risks of) dangers and discrimination against the Comorian community settled in Mayotte, and, more specifically, the younger generations. The consequences of the shifting of a European border in the heart of the Comorian archipelago since Mayotte became an outermost region of Europe (OR) in 2014, feed a reflection that transcends the whole of my study. The processes of exclusion are presented as a kind of red thread of the experience of foreigners in Mayotte, and more particularly of minors: the notion of exclusion is then thought of as a transversal reflection with regard to the multiple forms of relegation (social, school, family, administrative) suffered by young people from island mobility and, more broadly, by the Comorian community. This research contributes to the anthropological examination of a society which, in a few decades, has experienced significant and rapid normative upheavals, marked by demographic growth and dynamic migratory flows that have produced a series of generational, socio-educational, cultural and social breaks. We propose to examine the nature of these changes and to question the way in which the “post-border” generations and their families appropriate or not the European normative framework. In order to better understand the genesis of an education with African roots on a French territory where the question of transmission and its limits in a migratory context arises, this thesis focuses on Comorian families settled in Mayotte and confronted with a disturbed socio-educational environment, the objective being to reveal their adaptation strategies, the (new) place given to young people, as well as the representations surrounding their education in “migratory” context. However, in a context where the conflictual racialization of social relations leads to a politicization and a polarization of the debates around the Comorian and African otherness, childhood, its protection and its insertion, first appear with regard to the policy of combating illegal immigration and its corollary, the multifaceted fight against possible “draughts” that could allow a greater number of “foreigners” to stay on the territory and thus increase the attractiveness of Mayotte. This thesis therefore proposes to invest a still virgin field of study, namely that of cross-border juvenile migrations in the archipelago, and aims to bring to light the mechanisms at the origin of the migrations of minors and the family, cultural, legal, political, moral and social dimensions they take on. In Mayotte, the complexity of the relationship with the migrant foreigner is rooted in a historical conflict: the fight of French Mayotte, in parallel with the access to independence of the Comoros, has become the support of a singular identity claim. By defining the outline of the figures of otherness and what they teach us about the Mahoran collective imagination, we will see how the Mahoran identity and the safeguarding of a Mahoran cultural heritage, which attempt to free themselves from their Comorian heritage, pushed back to the margins of history, crystallize major heuristic issues. In this dynamic, my thesis aims to question the processes of categorization and the specificity of the place given to “the Comorian foreigner” as well as to his new contemporary figure: the Comorian minor.