Ecole Doctorale

Sciences Juridiques et Politiques

Spécialité

Doctorat en Science politique

Etablissement

Aix-Marseille Université

Mots Clés

Religion,Etats-Unis,Institutionnalisme,Politique publique,France,Laïcité,

Keywords

Institutionalism,Public policy,Secularization,France,Religion,United States,

Titre de thèse

Une perspective néo-institutionnaliste sur la divergence des modèles de séparation Église-État : Une analyse comparative des approches française et américaine en tant que paradigmes politiques
A Neo-Institutionalist Perspective on Variation in Church-State Separation Models:A Comparative Analysis of French and American Approaches as Policy Paradigms

Date

Jeudi 12 Mai 2022 à 16:00

Adresse

Faculté de Droit et de Science Politique 3 Avenue Robert Schuman Aix-en-Provence, 13100 Salle des Actes

Jury

Rapporteur Mme Claude PROESCHEL GRSL-EPHE / Université de Nancy
Président M. Philippe PORTIER GSRL- EPHE
Rapporteur M. Mark J. ROZELL George Mason University
Examinateur Mme Marie GAYTE-LEBRUN Université de Toulon
Examinateur Mme Hélène THOMAS Aix-Marseille Université
Examinateur Mme Odina BENOîST Aix-Marseille Université
Directeur de these Mme Blandine CHELINI-PONT Aix-Marseille Université

Résumé de la thèse

Pour expliquer la stabilité et déterminer la probabilité de changements à grande échelle dans la laïcité française et la séparation américaine de l'Église et de l'État, cette étude comparative mobilise la littérature existante et analyse les enjeux contemporains dans plusieurs domaines : séparation Église – État, sécularisation, citoyenneté et intégration, évolution du paysage religieux et institutions politiques supranationales. Dans le cadre de l'analyse politique, je soutiens que les approches américaine et française de la séparation entre l'Église et l'État répondent à la définition de paradigmes politiques et peuvent être analysées comme telles. Leur quasi « immortalité » (stabilité) est moins une preuve de leur efficacité à résoudre les problèmes publics (comme la gestion du pluralisme ou le maintien de la neutralité) que des avantages d'une politique établie (rendements croissants) et des coûts relativement élevés inhérents à l'abandon de la politique (respect du statu quo en raison de l'autorité statutaire et juridictionnelle, réticence à risquer une sanction électorale, mobilisation de groupes d'intérêt établis et intégration dans le récit national). De plus, j'affirme qu'au fur et à mesure que les « paradigmes de séparation » perdurent, les bénéfices augmentent et les coûts de leur résiliation potentielle augmentent. Loin d'être de simples résultats bénins de l'histoire politique et religieuse, je soutiens, à travers le prisme des réactions politiques (policy feedback), que ces paradigmes exercent leur véritable pouvoir en tant que producteurs qui définissent les règles du jeu : détermination des joueurs éligibles, répartition des ressources politiques et sociales et institutionnalisation de certains intérêts par rapport à d'autres – avec peut-être des coûts d'opportunité élevés. En raison de la stabilité hégémonique détenue par ces paradigmes, l'incrémentalisme est la voie la plus probable de changement. Des exemples sont donnés qui démontrent la capacité des paradigmes français et américains à absorber des changements progressifs sans menacer la stabilité des paradigmes (cette capacité à subir des changements mineurs protège les paradigmes des changements à grande échelle qui pourraient autrement être exigés par de nouveaux acteurs (politiciens, groupes d'intérêt, institutions supranationales) qui citent la non-réactivité des paradigmes comme preuve d'une non-viabilité défunte). Des crises, cependant, ont le potentiel de faire pression sur les paradigmes et d'induire des changements à grande échelle autrement peu probables. En appliquant la théorie de l'équilibre ponctué, je détaille les conditions nécessaires de quatre trajectoires hypothétiques de « grands changements » pour les deux paradigmes et j'analyse les études de cas pour déterminer dans quelle mesure les questions actuelles entre l'Église et l'État sont qualifiées de pressions suffisamment fortes pour ponctuer l'équilibre du paradigme et produire des changements à grande échelle. Cette étude introduit une nouvelle approche pour comprendre les changements liés à la séparation entre l'Église et l'État. Alors que l'approche du paradigme politique n'a été utilisée qu'avec modération dans la politique comparée, cette étude fournit un exemple de la manière dont l'approche peut aider à expliquer la résistance politique et institutionnelle au changement malgré les pressions importantes ainsi que les coûts potentiellement élevés de cette résistance pour l'adaptation aux nouvelles réalités sociales et politiques, l'intégration, la sécurité, la mobilisation politique, la cohésion sociale, le capital social et la démocratie participative, offrant de nouvelles perspectives sur des énigmes de recherche qui existent depuis longtemps.

Thesis resume

To explain the stability and determine the likelihood of large-scale changes in French laïcité and American separation of church and state, this comparative study mobilizes the extant literature and analyzes contemporary issues in several fields: church-state separation, secularization, citizenship and integration, shifting socio-religious demographics, and supranational political institutions. Adopting a policy analysis approach, I argue that American and French approaches to church-state separation meet the definition of policy paradigms and may be analyzed as such. Their near ‘immortality’ (stability) is less evidence of their efficacy in solving public problems (such managing pluralism or maintaining neutrality) than evidence of the standard benefits of established policy (increasing returns) and relative high costs inherent to policy termination (deference to the status quo because of statutory and jurisdictional authority, reluctance to risk electoral punishment, established interest group mobilization, and integration into national narrative). Furthermore, I reason that as these ‘separation paradigms’ endure, benefits accrue and the relative costs of their potential termination increase. Far from being merely benign idiosyncratic outputs of political and religious history, I argue that these paradigms function as part of the policy feedback loop–exercising their true power as inputs which define the rules of the game: determining eligible players, distributing political and social resources, and institutionalizing certain interests over others–regardless of social opportunity costs. Finally, I discuss the possibility for paradigm change in the French and American contexts. Because of the extent to which these paradigms enjoy hegemonic stability, incrementalism is the most likely avenue for change. Examples are given which demonstrate the French and American paradigms’ capacity to absorb incremental change without threatening paradigm stability (this ability to undergo minor changes protects paradigms from large-scale modifications that might otherwise be demanded by new actors (politicians, interest groups, supranational institutions) who cite paradigm non-responsiveness as proof of defunct non-viability). Crisis, however, has the potential to pressure paradigms and induce large-scale changes otherwise unlikely. Applying punctuated-equilibrium theory, I discuss the necessary conditions of four hypothetical “big-change” trajectories for the two paradigms and analyze the case studies to determine the extent to which current church-state issues (such as France’s Anti-Separatism law and the participation of Evangelicals in the January 6, 2021 insurrection at the U.S. capitol) qualify as pressures strong enough to punctuate the paradigm’s equilibrium and produce large-scale change. This study introduces a new approach to understanding changes in church-state separation. While the idea of policy paradigms has been used only sparingly in comparative politics, this study provides an example of how the concept and its use in the greater methodological and theoretical context of policy analysis can help to explain political and social resistance to change despite the presence of significant pressures to change. Additionally, the approach makes visible the otherwise hidden costs of such policy resiliency, namely the ability for a democracy to adapt to new social and political realities in areas as foundational to democratic stability as integration, security, voter turnout, political mobilization, social cohesion, social capital, and ideological polarization. In these ways, this approach offers new perspectives on longstanding research puzzles.