Soutenance de thèse de Claire DESHAYES

Stenberg et Lubart définissent en 1996 la créativité comme la capacité à produire un travail nouveau et approprié à la tâche. Dans des pathologies comme le Traumatisme Crânien (TC) la capacité à faire face et à être innovant est primordiale pour une récupération optimale. Actuellement la réinsertion professionnelle des patients TC n’est pas idéale, seulement la moitié d’entre eux retrouve une activité professionnelle dans les années qui suivent l’accident. Certaines rééducations dîtes holistiques dispensent une prise en charge globale de l’individu en s’appuyant sur des facteurs cognitifs, psychologiques, émotionnels et environnementaux. D’après Lubart et al. (2003), le point commun entre ces facteurs serait le potentiel créatif. Ceci met en lumière l’importance d’une meilleure caractérisation des processus créatifs pour améliorer la rééducation holistique chez les patients TC. La créativité est sous-tendue par de multiples facteurs qui interagissent entre eux or, elle est souvent étudiée à partir d’un seul facteur. C’est pourquoi dans une première étude, nous avons adopté une vision plus large de l’individu, en différenciant le niveau de créativité de 45 adultes sains sur la base d’un modèle de fonctionnement cognitif construit grâce à la modélisation d’équation structurelle (SEM-PLS). Ce modèle suppose l’influence de la mémoire de travail et de la pensée analytique sur la créativité. L’étude en IRMf de l’activité cérébrale de repos de ces sujets a révélé que les personnes très créatives ont une connectivité fonctionnelle augmentée dans le réseau attentionnel (AN) et le réseau du mode par défaut (DMN). Ces résultats, en accord avec les théories cognitives de la créativité nous ont conduit à l’appréhender et à la stimuler grâce à une approche holistique plus basée sur un fonctionnement cognitif que sur des fonctions cognitives stimulées de façon indépendante. Dans une deuxième étude, nous avons construit sur la base de 83 sujets adultes sains un modèle cognitif (SEM-PLS) stipulant l’influence de l’inhibition, de la flexibilité et du raisonnement sur la pensée innovante qui est nécessaire à la créativité. Ce modèle nous a permis d’évaluer l’impact d’un entrainement en résolution de problèmes créatifs sur le fonctionnement cognitif et cérébral de 16 sujets. Un deuxième groupe de 15 sujets entrainés avec des mots croisés nous a permis d’évaluer la spécificité des effets de l’entraînement et enfin un troisième groupe sans entraînement de 52 sujets nous a servi de contrôle. Les résultats ont montré que, pour le groupe contrôle et celui entrainé avec les mots croisés, la pensée innovante est influencée par le raisonnement, alors que pour le groupe entrainé en résolution de problèmes, elle est influencée par la flexibilité. Cette modification s’accompagne d’une augmentation de la connectivité cérébrale de repos dans l’AN et le réseau visuel (VN). Ces résultats démontrent qu’un entrainement cognitif basé sur la résolution de problème favorise la pensée innovante en changeant la façon dont le sujet recrute les processus cognitifs nécessaires à la résolution du problème. Ce changement est sous-tendu par des modifications de la connectivité fonctionnelle de réseaux de repos. Ces résultats positifs nous ont conduit dans une dernière étape à élaborer et évaluer un entrainement holistique basé sur la créativité à destination de patients TC. L’évaluation de cet entraînement chez 4 TC a montré une amélioration cognitive globale accompagnée de changements de la connectivité fonctionnelle de repos et de changements structuraux évalués par l’imagerie en tenseur de diffusion. L’ensemble de ces résultats, souligne que la créativité est une fonction à développer dans la prise en charge des patients car elle permet une meilleure récupération cognitive et peut ainsi favoriser leur réinsertion socio- professionnelle. De plus, son étude doit impérativement se faire de façon plus holistique afin d’intégrer les multiples facteurs qui la sous-tendent.

Stenberg and Lubart defined creativity in 1996 as the ability to produce work that is new and appropriate to the task. In pathologies such as traumatic brain injury (TBI), the ability to cope and be innovative is essential for successful recovery. Currently, vocational reintegration of TBI patients is not ideal since only half of them return to professional activity in the years following the accident. Some so-called holistic rehabilitation approaches provide comprehensive care for the individual and are based on cognitive, psychological, emotional and environmental factors. According to the model of Lubart and al. (2003), the common point between these factors is the creative potential. This highlights the importance of a better characterization of creative processes to improve holistic rehabilitation in TBI patients. Creativity is underpinned by multiple factors that interact with each other and is often studied from a single factor. Therefore, in a first study, we took a more comprehensive view of the individual, differentiating the level of creativity of 45 healthy adults based on a model of cognitive functioning constructed through structural equation modeling (PLS-SEM). This model assumes the influence of working memory and analytical thinking on creativity. The fMRI study of the resting state activity of these subjects revealed that highly creative individuals have increased functional connectivity in the Attentional Network (AN) and Default Mode Network (DMN). These results, in line with the cognitive theories of creativity, have led us to assess and stimulate it using a comprehensive approach based more on cognitive functioning than on independently stimulated cognitive functions. In a second study, we constructed a cognitive model (PLS-SEM) based on 83 healthy adults, assuming the influence of inhibition, flexibility and reasoning on the innovative thinking that is necessary for creativity. This model allowed us to evaluate the impact of creative problem-solving training on the cognitive and cerebral functioning of 16 subjects. A second group of 15 subjects trained with crossword puzzles allowed us to evaluate the specificity of the effects of training and finally a third group without training of 52 subjects served as a control. The results showed that, for the control group and the crossword puzzle-trained group, innovative thinking is influenced by reasoning, while for the problem-solving group it is influenced by flexibility. This change is accompanied by an increase in resting state functional connectivity in the AN and visual network (VN). These results show that cognitive training based on problem solving promotes innovative thinking by changing the way the subject recruits the cognitive processes needed to solve the problem. This change is underpinned by changes in the functional connectivity of resting state networks. These positive results led us in a final step to develop and evaluate a holistic creativity-based training for TBI patients. Assessment of this training in 4 TBI patients showed an overall cognitive improvement accompanied by changes in functional resting state networks connectivity and structural changes assessed by diffusion tensor imaging. All these results underline that creativity is a function to be developed in the rehabilitation of patients because it allows a better cognitive recovery and can thus promote their social and professional reintegration. Moreover, it is imperative that the study be carried out in a more holistic manner in order to integrate the multiple factors that underlie creativity.