Soutenance de thèse de Eloïse VINSON

L’embryon est un objet social particulier : sa trajectoire socio-historique en fait un objet complexe et tensionnel, dont la définition est soumise à de nombreuses controverses qui s’actualisent dans différentes sphères de la vie sociale. Il est ainsi impliqué en tant qu’entité « publique » et politique. Ces controverses sont aussi alimentées par les innovations technoscientifiques, et en particulier les outils de visualisation qui ont permis de détecter sa présence, de le voir, de l’entendre dès les premiers jours de son développement. Cette thèse vise à étudier la construction socio-représentationnelle de l’embryon dans le contexte français, en analysant les substrats idéologiques sous-jacents à sa définition et les appartenances sociales qui permettent d’observer l’adhésion à différentes conceptions de son statut (être humain ou amas de cellules), notamment au prisme des images. Le contexte des innovations technoscientifiques et reproductives apparaît comme un cadre fécond qui faciliterait le dévoilement de contenus socio-représentationnels associés à l’embryon humain. Quatre études ont été menées pour répondre aux objectifs susmentionnés : (1) une analyse psychosociale des états généraux de la bioéthique (2) une approche figurative des représentations sociales sur l’embryon humain basée sur une consigne de production de dessins d’embryons humains, (3) une démarche quantitative étudiant par le biais d’un questionnaire les représentations iconographiques de l’embryon humain à travers une tâche de classement d’images, les prises de position à propos de son statut (être humain vs amas de cellules) et les ancrages associés à ces prises de positions d’une part et aux choix iconographiques d’autre part (genre, parentalité, religion, appartenance politique) (4) une enquête par entretiens visant à explorer les enjeux et légitimations des technologies associées à l’embryon au prisme de la procréation et du niveau d’implication à l’objet (étude 4). Les résultats révèlent que les sujets sociaux peuvent définir l’embryon soit comme un amas de cellules, soit comme un être humain, ce qui est également visible sur le plan figuratif. Ces prises de position traduisent les ancrages des sujets et sont mobilisées pour (dé)légitimer certains biotechnologies (i.e., recherche sur l’embryon). Toutefois, des adhésions contextuelles à la définition du statut de l’embryon sont également relevées, et dévoilent les structures idéologiques et sociales qui sous-tendent ces représentations. Mots-clés : embryon humain ; biotechnologies ; représentations sociales ; iconographie

The embryo is a particular social object: its socio-historical trajectory makes it a complex an tensional object, whose definition is subject to numerous controversies that materialize in different spheres of social life. It is thus involved as a "public" and political entity. These controversies are also fueled by technoscientific innovations, particularly visualization tools that have made it possible to detect its presence, see it, and hear it from the earliest days of its development. This thesis aims to study the socio-representational construction of the embryo in the French context, by analyzing the ideological foundations underlying its definition and the social belongings that reveal adherence to different conceptions of its status (human being or cluster of cells), particularly through the study of images. The context of technoscientific and reproductive innovations appears as a fertile framework that reveals socio-representational content associated with the human embryo. Four studies were conducted to answer the mentioned objectives: (1) a psychosocial analysis of the French états généraux de la bioéthique (public debate) ; (2) a figurative approach to social representations of the human embryo based on a task of producing drawings of human embryos; (3) a quantitative study, using a questionnaire, of the iconographic representations of the human embryo through an ranking task, the positions taken regarding its status (human being vs. cluster of cells), and the anchoring associated with these positions as well as with iconographic choices (gender, parenthood, religion, political affiliation); and (4) a series of interviews aimed at exploring the issues and legitimization of technologies associated with the embryo through the lens of procreation and the level of involvement with the object. The results reveal that social actors can define the embryo either as a cluster of cells or as a human being, which is also visible on the figurative level. These positions reflect the actors' anchoring and are used to (de)legitimize certain biotechnologies (e.g., research on embryos). However, contextual adherence to the definition of the embryo’s status is also observed, unveiling the ideological and social structures underlying these representations.